Quarnstron a écrit :archibald a écrit :-D'où sort ce bateau de pêche ? Pour recevoir ce message par signaux émis depuis une falaise de Gibraltar, il a fallu qu'il soit averti longtemps avant pour pouvoir prendre la mer et se présenter au bon endroit en face du rocher. A moins qu'il soit là par téléportation ? Je pense qu'il est là en permanence. Que les alliés le savent et qu'ils attendent volontairement pour le leurrer (En fait, ça, à la limite, ça pourrait faire sens. Et serait cohérent avec l'idée initiale de grands chefs. Même si elle reste ridicule stratégiquement).
(...)
- Ce bateau est-il là tous les soirs en attendant un message en faisant semblant de pêcher ? Ne serait-ce pas un peu louche ?
Je pense qu'un bateau de pêche italien -
s'il est italien - ne peut pas être là, sous le nez des Anglais. Avant même le débarquement en Afrique du nord (novembre 1942), un ou deux patrouilleurs anglais, basés à Gibraltar, circulaient quasiment en permanence dans le détroit, à vue du Rocher, pour surveiller. Tout ce qui passait était repéré, suivi, approché pour identification. Les marins français (de Vichy) qui voulaient rejoindre le camp allié le savaient et plus d'un a tenté (et réussi) de se jeter à l'eau depuis le pont de son bateau franchissant le détroit, pour être recueilli par ces patrouilleurs et conduit à Gibraltar. Il y a des histoires formidables à raconter là-dessus - et des histoires tristes quand une affaire tourne mal pour les marins "vichystes" qui ont échoué dans leur tentative de ralliement... voir l'affaire Pillien et Peyrat en 1942. Plus d'un équipage a également tenté (et réussi) de détourner carrément son bateau et de rejoindre Gibraltar où il était accueilli à bras ouverts... après une période d'observation. La surveillance étroite de tout le trafic dans le passage a continué tant que la guerre n'était pas finie. Entre autres, au moyen d'avions de patrouille maritime Catalina, le même type d'avion qu'ont utilisé Blake & Mortimer pour mener leur étrange mission. Cette surveillance fut telle qu'elle a forcé les Allemands à entrer en Méditerranée depuis l'océan Atlantique au moyen de sous-marins qui restaient évidemment en plongée.
Par ailleurs, pour tenter de plastiquer les bateaux alliés en escale à Gibraltar, en posant des mines contre les coques de ces bateaux, les fameux commandos italiens de la Decima Mas du prince Borghèse ont rusé pour ne pas se faire voir. Ces nageurs de combat audacieux ont utilisé des mini-sous-marins de poche, les "maïali" (là, ce sont de vrais mini-sous-marins, pas des balises comme celles qu'a imaginées et construites Mortimer dans la BD), pour ne pas être vus en surface, et, pour certaines opérations, ont revêtu des scaphandres ne provoquant pas l'émission de bulles d'air (toujours pour ne pas se faire voir en surface). Alors, si des bulles d'air pouvaient être aperçues par les sentinelles anglaises, que dire d'un bateau de pêche qui a un comportement pas très normal...?!
Les Italiens ont quand même réussi deux beaux coups : ils ont installé un poste d'observation côté espagnol (Gibraltar est une excroissance du territoire espagnol), dans une maison anodine qu'un tranquille couple d'agents a simplement louée. Il s'agit de la villa Carmela, située à vol d'oiseau à 4 km de Gibraltar. Donc, s'il fallait envoyer des signaux lumineux à des Italiens, il y avait moyen, vers cette maison et non vers un improbable bateau ami passant au large. Par ailleurs, les Italiens ont réussi à trafiquer une épave de bateau échouée à Algésiras (port espagnol en face, et à un jet de caillou, de Gibraltar) et à installer à bord un atelier, au nez et à la barbe des Anglais (comme des Espagnols). Ce cargo, l'
Olterra, bien qu'immobile, était un véritable "cheval de Troie" ; une trappe amovible, sous la ligne de flottaison, permettait aux plongeurs italiens de sortir sous l'eau sans être vus et de mener quelques attaques.
Alors si les Italiens ont pris autant de précautions pour ne pas être vus en surface, même en évitant de montrer des bulles d'air en surface, on peut imaginer qu'ils ne songeraient jamais à venir, encore moins tous les soirs comme l'avance Archibald, avec un bateau de pêche...
De toute façon, les opérations italiennes contre Gibraltar et d'autres bases alliées en Méditerranée (Alexandrie, Malte) se sont arrêtées en 1943. Alors, en mai 1944, qu'un bateau de pêche italien ou au service des Italiens viennent tournicoter autour du rocher de Gibraltar, ceci paraît hautement improbable, pour ne pas dire impensable.